L'amie de Sarah Stewart

Une couverture pleine de tendresse, représentative de l'histoire réelle racontée dans ce livre jeunesse

Dans ma bibliothèque, trône en bonne place un album jeunesse abordant le thème de l'amitié de manière inédite. Paru en 2005 aux éditions Syros, il s'agit de L'amie de Sarah Stewart pour le texte et David Small pour les illustrations. Une collaboration réussie déjà éprouvée sur le livre jeunesse Le jardin secret de Lydia.

L'histoire d'une amitié

Comme le titre l'indique, l'album traite du thème de l'amitié. Il s'agit d'un lien amical fort entre deux personnages que tout oppose. D'un côté, une fillette de bonne famille prénommée Belle, de l'autre, Béa, une gouvernante aux cheveux gris. Il y a aussi la différence de couleur de peau. N'oublions pas que le récit se déroule dans les années 1950 aux Etats-Unis et que le racisme bat son plein. Cette amitié se caractérise par des gestes tendres entre la femme et l'enfant. La petite fille qui souffre l'absence de ses parents, reçoit toute l'affection de la gouvernante. Les illustrations, à la plume et à l'aquarelle, mettent l'accent sur ces moments de complicité entre les deux personnages. Les images occupent d'ailleurs une place prépondérante au sein du livre. Elles décrivent des scènes de la vie quotidienne à la fois touchantes et amusantes. L'enfant commet des bêtises de son âge sous l'oeil bienveillant de Béa. Le texte n'est pas en reste puisqu'une phrase revient régulièrement et montre à quel point le lien qui unit les deux personnages est fort : "Main dans la main, Belle et Béa, au bord de l'eau...". Les deux prénoms Belle et Béa restent associés dans cette phrase à la consonance poétique.

La délicatesse des illustrations renforce à la fois la tendresse qui lie les deux personnages et la frivolité de la Vie

Le regard bienveillant de Béa couve la petite fille, espiègle et malicieuse

"Main dans la main, ...", la phrase revient en boucle et montre que Belle et Béa sont inséparables

Un album complexe ?

Certes, le livre traite d'un sujet universel et intergénérationnel, mais celui-ci s'avère assez complexe pour les très jeunes lecteurs. Par conséquent, je le conseille plutôt à partir de 7/8 ans. Les paroles de la gouvernante sont pleines de sagesse et font souvent référence à la religion, et certains mots tels que "vaporiser", "épousseter", "virevoltant", "emplettes" peuvent poser problème, au même titre que le terme de "gouvernante".

Les doubles pages d'illustrations font aussi dans la subtilité et amènent au drame qui va se dérouler, à savoir la noyade de la fillette. Le ballon rouge apparaît comme un fil conducteur. Ces éléments pourront être imperceptibles par les jeunes lecteurs, tout comme la mort de la gouvernante, passée sous ellipse.

Béa sauve Belle de la noyade et la serre fort dans ses bras. Le ballon rouge, lui, est pris par les flots

La dernière page montre l'enfant devenu femme. En réalité, le livre est un hommage que l'auteur Sarah Stewart a voulu décerner à sa bonne. Sarah et Belle ne font qu'une.

Perso

A mes yeux, il existe plusieurs niveaux de lecture. Les enfants peuvent ne pas percevoir toutes les nombreuses subtilités du texte et de l'image. Bien sûr, ils resteront sensibles à l'amitié entre la petite fille et sa gouvernante, ce qui reste essentiel. L'intervention d'un adulte pour expliquer l'album plus en profondeur me semble souhaitable.

Toutefois, malgré son apparente complexité, ce livre jeunesse a le mérite de s'intéresser au thème de l'amitié en le liant à l'Histoire. D'ailleurs, on peut comparer le livre pour enfant à un roman pour adulte : celui de Kathryn Stockett, La couleur des sentiments.

L'amie, Sarah Stewart (texte) et David Small (illustrations), Editions Syros, 2005, 16 euros.

ISBN : 2748503163